Deux handicapés du sentiment, voilà ce qu'ils étaient devenus. Et Edward pensait que c'était irrémédiable.
Ils n'y arriveraient pas. Ils n'y arriveraient plus. C'était trop tard.
La mère d'Edward est maniaco-dépressive depuis qu'elle l'a mise au monde : alternant des phases d'exaltation et de dépression qui la conduisent à l'hospitalisation, elle est incapable de s'occuper de son fils ni même de lui prodiguer un simple geste de tendresse.
Alors en grandissant, Edward a lui-même développé des angoisses et des TOC (troubles du comportement) qui font qu'il est rejeté par les autres au lycée. Surnommé "Ed le timbré", il est régulièrement racketté et humilié par la bande des "Border Line". Ses seuls amis sont des gamers qu'ils retrouvent tous les soirs en ligne : avec eux, plus d'angoisse ni de peur, juste l'adrénaline du jeu.
Mais ce soir-là à son retour, sa mère lui annonce qu'elle est guérie : elle a compris des choses sur son passé et se sent prête à prendre un nouveau départ avec lui. Edward n'y croit pas du tout. Cependant un terrible événement va le laisser seul en tête à tête avec cette mère qu'il déteste et il va vite être fixé sur son état mental...
Mon avis :
La première partie de ce roman m'a captivée ! C'est un condensé de malaise angoissant, entre la "prison dorée" où vit Edward avec ses parents et sa dame de compagnie, et l'institut catholique pour garçons (soi-disant !) de bonne famille où il est victime de harcèlement. Edward vit dans une extrême solitude. Son père, qu'il adore, est un architecte de renom souvent absent pour son travail. Heureusement il y a Helena, la jeune Italienne qui lui tient compagnie le soir, et Mme Hagger, la cuisinière, qui lui apporte l'affection maternelle dont il manque tant. Pour autant Edward est un adolescent malheureux, comme en témoignent ses compulsions à classer ses stylos dans l'ordre de l'arc-en-ciel ou à enfiler ses vêtements dans un ordre immuable. Il faut dire qu'au lycée, Traval et Bosco ne lui font pas de cadeau: l'institut St-Nicolas a beau accueillir des fils de personnalités politiques ou de grandes fortunes de France, la violence y est aussi présente qu'ailleurs. Seul le jeune Henri-Pierre se révèle de son côté : il faut dire qu'il est aussi malmené que lui...
Le début de la deuxième partie m'a semblé un peu long. La tension retombe et le récit s'éternise sur plusieurs chapitres. Le calme avant la tempête... Car dans le dernier tiers, le suspense reprend, avec une mère de plus en plus possessive, à la jalousie maladive : "Folle de jalousie, ou folle tout court ?", se demande Edward. Le thriller redevient oppressant, "ta mère cache quelque chose", lui révèle Helena. Une mère qui fait vraiment peur ! Il est cependant dommage que l'action et la pirouette finales soient aussi convenues... On aurait aimé une fin à la hauteur de l'intrigue : percutante !
Ce roman reste néanmoins un thriller efficace, avec beaucoup de tension et d'action!
Patricia Deschamps, juin 2015
L'avis de Catherine :
Un coup de cœur c'est certain pour cet excellentissime thriller jeunesse !
Jo Witek nous offre un roman poignant avec une écriture dynamique, imagée, efficace et précise. Un bon thriller en plusieurs étapes avec des accalmies puis une reprise hors norme de la tension psychologique.
Le récit propose une bonne installation du décor et des personnages à la psychologie particulière. L'auteur prend le temps de développer cet aspect important: les sentiments mêlés, les rêves et les frustrations de chacun. La psychologie du personnage principal sera développée tout au long des pages. Sa réaction violente, viscérale, est parfaitement bien rendue par un style imagé.
Les indices sont donnés au lecteur, disséminés peu à peu mais avec un tel talent qu'on n'y prête pas attention, on les voit comme des détails jusqu'au moment où ils prennent sens et où le puzzle se met en place. Pas de temps mort, rien d'inutile. Un récit haletant qui nous tient en alerte et nous bouleverse.
Je découvre cette auteur et je compte bien la lire encore !
Décembre 2016