Novak court. Il est poursuivi et fuit pour sauver sa peau. Heureusement, il a Scarlett avec lui. Scarlett, l’intelligence artificielle de son brightphone. Celle qui connaît toute sa vie, tous ses secrets, qui le guide dans la ville, collecte chaque donnée, chaque information qui le concerne. Celle qui répond autant à ses demandes qu’aux battements de son cœur. Scarlett seule peut le mettre en sécurité. A moins que… Et si c’était elle, précisément, que pourchassaient ses deux assaillants?
(4e de couverture)
Mon avis :
J'ai reçu ce livre en spécimen dans mon collège et c'est vrai que je travaille chaque année sur l'intelligence artificielle en technologie 3e. Certaines vulgarités me font cependant hésiter à le conseiller aux élèves ("On n'est pas des enculés", "L'autre lui malaxe les couilles", "Dis à ta salope de nous ouvrir ses cuisses", "Il est presque en train de jouir"), même si le récit est très dynamique (il commence en pleine action et les chapitres sont très courts) et la réflexion pertinente.
Pour Novak, Scarlett est plus qu'une IA: c'est une amie qui l'accompagne au quotidien grâce à ses fonctionnalités affinées. Le brightphone et les Gapple Glass (lunettes) qu'elle pilote constituent un véritable concentré de technologie! Alors, tandis qu'il est pourchassé, le jeune homme "espère une intuition humaine"... qui ne vient pas. Malgré les avancées réalisées, l'interprétation algorithmique des émotions reste "foireuse". Pire: en moins de deux minutes, toute la configuration de Scarlett est effacée! Sécurité des données: zéro... Pour Novak, la réinitialisation de son téléphone est un total "life reboot" et il pleure son IA comme s'il avait perdu un proche ("Scarlett a été assassinée").
Sans son brightphone, Novak est perdu, au sens propre comme au figuré. Se sentant comme nu, entièrement vide, il ne sait ni ne peut plus rien faire (y compris payer ses croissants, c'est ballot): "Tout était sur le phone, enregistré". Et voilà bien le message de l'auteur: faire réaliser notre dépendance à l'objet. Novak était tellement accro à son IA qu'il est persuadé qu'il est impossible de trouver ce genre de relation de proximité IRL... C'est triste. Heureusement l'expérience lui aura servi de leçon et il apprendra à réinvestir la vraie vie, à "lever le nez vers le ciel" plutôt que de pencher la tête vers l'écran.
Le slam en postface, qui fait écho à la chanson de Soprano, "Mon précieux", résume bien cette thématique ("Tu voyages avec les doigts") qui aurait, selon moi, mérité une histoire complète.
Patricia Deschamps, décembre 2022