Le journal du soir – Flash info
" Surréaliste, atroce, apocalyptique... Le lancement de la crème de beauté Selenium continue de faire parler de lui. L'actrice et influenceuse Neomi Swan, égérie de la marque, en a documenté l'horreur absolue sur Instagram. Les images montrent les invités pris de pulsions sanguinaires, menant des attaques d'une violence inouïe. On y distingue du sang, et des morceaux de chair humaine jonchent le sol. Une scène digne d'un film de zombies ! Le gouvernement a placé la zone en quarantaine, exhortant même à utiliser la violence si la confrontation avec un infecté est inévitable. Impossible d'en savoir davantage ! Combien de morts ? Que deviennent les personnes barricadées dans la zone ? Les fans de l'actrice réclament déjà un rapatriement... "
Mon avis :
Si j'étais vous, j'y réfléchirais à deux fois avant d'appliquer cette crème de beauté sur mon visage... Et si elle vous transformait en zombie comme la pauvre Neomi ?!
Neomi, Jude et Tim: ils sont trois à alterner leur voix dans cette histoire de contaminés enragés "enfermés comme dans un bunker" dans les quartiers dévastés et désertés de Paris ("On dirait qu'on est seuls au monde"). Une situation qui n'est pas sans rappeler le confinement lié au covid... voire la guerre froide avec ce mur érigé pour empêcher les "créatures" de sortir! Mais avec Aurélie Gerlach, l'humour n'est jamais loin, et les Walking dead bobos parisiens font davantage sourire que peur.
Neomi la superficielle, plus fashion que zombie week, représente tout ce que déteste Jude l'éco-socio engagée. Et pourtant... Cette (més)aventure en mode survie au milieu des zombies va créer un lien entre elles: tandis que l'une se transforme physiquement, l'autre évolue psychologiquement ("J'avais beau dénoncer, crier, protester, le soir, je retrouvais invariablement le confort de ma chambre"). J'ai aimé vivre de l'intérieur le combat de Neomi contre la zombification par la crème tueuse, qui alterne les moments de sauvagerie et de lucidité ("Mes idées ne vont pas tarder à s'embrouiller de nouveau, je dois agir vite").
Et puis il y a Tim. Le mystérieux Tim. Que faisait-il à la conférence de presse de Selenium? Qui est cette Lula qui tente de le joindre? Et Natacha? Bientôt le trio se voit rallié par Enzo, un "allumé aux cheveux bleus qui se trimballe avec un pistolet à clous" ("Katniss Everdeen version cheap avec des armes pillées chez Castorama"), Sirine l'étudiante et... un mouflon baptisé Noblesse Royale (je vous avais prévenus que l'autrice était déjantée)!.. On passe alors en mode expédition au labo Selenium pour tenter de trouver un antidote pour Neomi. Et le gouvernement pendant ce temps-là? Après les sentinelles en haut du mur et les CRS face aux manifestants, il envoie l'armée bombarder la zone contaminée (...).
Mais ne croyez pas que l'intrigue s'arrête là. Elle n'est pas aussi transparente que Neomi. Ce que dénonce le personnage de Jude, c'est la superficialité de ceux qui n'existent qu'à travers les apparences et la consommation ("dépenser un salaire entier dans iPhone sans se soucier des gosses qui meurent en les fabriquant"). D'ailleurs, dans l'épilogue se déroulant après la contamination, la société se retrouve divisée en deux camps: "ceux qui voudraient revenir à la situation d'avant", et ceux "qui aimeraient que l'on se pose davantage de questions": moins de produits chimiques dans les produits du quotidien, plus d'attention portée à la santé et à l'écologie qu'aux profits, un mode de consommation plus sain et respectueux de la planète.
La fin est inattendue. Le combat de Jude prend une forme nouvelle... et surprenante.
Quant à moi, je ne verrai plus les lapins de la même manière.
Patricia Deschamps, octobre 2021