- Dis, Lou, tu te souviens de notre première rencontre ? Je veux dire, de la première fois où nous avons discuté toi et moi ? Si on m'avait dit que, ce jour-là, je venais de t'ouvrir une fenêtre sur ma vie, que nos histoires seraient liées aussi longtemps, je ne l'aurais pas cru.
- Tu sais, Sonia, tu as toujours été la plus forte de nous deux. la plus souriante, la plus lumineuse. A côté de toi, je me suis souvent sentie sombre, très sombre. J'imagine que c'est ce mélange de noir et de blanc qui a permis que nous en soyons là aujourd'hui.
Sonia est en 1ère L dans un petit lycée de Normandie. Enthousiaste et déterminée, elle est passionnée par l'écriture et rêve d'en faire son métier.
Lou est en 1ère S à Angoulême. Solitaire et manquant de confiance en elle, elle a laissé sa mère lui imposer une orientation scientifique alors que c'est le dessin qu'elle adore.
Un jour, Sonia s'inscrit sur le site Trames qui réunit des auteurs et des illustrateurs amateurs. Parmi ceux-ci, Lou, qui est d'emblée séduite par ses textes.
Les deux filles commencent à se lier d'amitié et entame un projet commun via internet : produire une nouvelle de fantasy illustrée pour la Japan Expo de juillet à Paris...
Mon avis :
Une belle histoire d'amitié entre deux jeunes filles réunies par une passion commune : la création artistique.
Au premier abord, tout oppose Sonia et Lou. La première, épanouie et populaire, évolue sereinement entre son meilleur ami Matthieu, les cours de français qu'elle adore et son attirance pour le beau Peter. Issue d'une famille où on ne lui impose aucune règle, elle a décidé de s'inscrire à l'internat pour s'imposer un cadre de travail.
A l'opposé, Lou n'a aucun ami (les filles de sa classe la taxent d'intello) et suit une psychothérapie (avec antidépresseurs) depuis le départ de son père. Sa mère l'étouffe, les cours l'ennuient, et seul le dessin apaise ses angoisses.
Leur rencontre sur Trames semble donc celle du jour et de la nuit. Sauf que les adolescentes ont en réalité quelques points en commun : une situation familiale difficile, et un rêve dénigré par leur entourage. Car derrière son assurance, Sonia cache des doutes et des secrets... La liberté octroyée par ses parents lui apparaît comme de la négligence, et puis ses études littéraires sont dénigrées par sa famille qui ne jure que par les filières scientifiques. De son côté, Lou apprend avec Sonia qu'il suffit parfois de peu pour qu'une situation évolue. Elle va progressivement prendre confiance en elle et s'imposer. Il faut dire que toutes deux sont ultra motivées pour percer dans le métier, conscientes que "même avec des facilités, on n'arrive à rien sans labeur". On sent bien sûr derrière les situations et les propos tout le vécu personnel de Samantha Bailly, dans ce roman que je suppose d'inspiration autobiographique !
Au bout du compte, même s'il est vrai "qu'on ne peut jamais savoir qui est derrière l'écran" (l'un des personnages d'ailleurs, cache bien son jeu), Sonia et Lou vont se trouver par confidences et projets interposés. Ces deux-là se complètent, et vont prouver que ce qu'elles ont construit ensemble "est bien réel".
Alors certes, il ne se passe rien d'extraordinaire dans ce roman qui enchaîne les tranches de vie sur une année scolaire : la famille, les amis, le lycée, l'amour... Mais c'est une simplicité qui sonne juste, une histoire qui touche parce qu'elle fait écho, des mots vrais qui nous parlent de blessures et d'espoir, de vocation et de rêves. Nul doute que de nombreuses jeunes filles se reconnaîtront dans l'une ou l'autre des héroïnes !
Patricia Deschamps, septembre 2015
Je vais y arriver. Je le sais. Un jour, je deviendrai écrivain.
Depuis leur rencontre sur le forum de création Trames, Sonia et Lou partagent au quotidien joie et soucis tout en travaillant sur un projet de BD commun. Elles sont désormais en Terminale et le bac les accapare beaucoup. Lou prépare son dossier d'admission à l'école des Gobelins et Sonia travaille sur son premier roman, Mandala.
Mais l'une comme l'autre attendent en secret la rencontre qui viendra bouleverser leurs journées ! Or un certain Vittore fait son arrivée dans la classe de Lou, tandis que Sonia se voit présenter Gabriel, un étudiant en éco, par l'intermédiaire de son meilleur ami Matthieu...
Mon avis :
C'est avec un réel plaisir que j'ai retrouvé les deux copines le temps d'une année scolaire. Et pas n'importe laquelle : celle du "compte à rebours avant la croisée des chemins".
La construction narrative est toujours identique : chaque mois, la parole est laissée tour à tour à chacune des filles. Le récit est entrecoupé de sms et autres mails, ce qui le rend très fluide et rythmé, un véritable page turner ! Personnellement, j'ai trouvé le personnage de Sonia plus attachant, peut-être parce qu'elle est animée du vécu de l'auteur elle-même. Elle est solaire et positive, et j'ai apprécié sa complicité avec Matthieu son ami de toujours dont on suit également l'évolution avec intérêt (notamment l'affirmation de son homosexualité). Lou "l'intello asociale" est plus tourmentée et solitaire, même si elle va s'ouvrir un peu aux autres grâce à Vittore. En fait les deux amies se complètent et s'apportent beaucoup l'une à l'autre !
Cependant ce qui est le plus captivant dans ce roman, c'est toute la réflexion sur l'après bac, les choix d'orientation et donc d'avenir qui sont si difficiles à faire. Il n'y a "pas d'école pour devenir écrivain" alors quel cursus envisager ? Faut-il privilégier sa passion ou bien les débouchés possibles ? Si Sonia et Lou ont hâte d'entamer une vie d'étudiante, hâte que "l'horizon s'élargisse", celui-ci reste bien obscure... Il faudra bien l'année et tous ses petits inattendus pour "rendre l'avenir plus concret, tangible" et celle-ci sera déterminante à bien des points de vue! Ainsi, lorsque l'on quitte les héroïnes en août, "une époque s'achève bel et bien", remplie de projets et d'espoir, avec "la sensation d'avoir enfin trouvé sa place quelque part".
Patricia Deschamps, mars 2017
Il s'agit d'être une artiste. De trouver son identité, de véhiculer une singularité.
Suivant toutes les deux leur formation post-bac à Paris, Sonia et Lou décident de s'installer ensemble.
Tandis que Sonia adore son cursus philosophique à la Sorbonne, sa nouvelle liberté et les fêtes étudiantes, Lou est beaucoup plus stressée par sa prépa aux Gobelins qui requiert énormément de travail.
Non seulement la jeune dessinatrice doute de son choix mais elle se détache de leur projet commun de BD, Trames jumelles, et ne s'implique guère dans les tâches quotidiennes.
L'ambiance ne tarde pas à devenir électrique entre les deux colocataires...
Mon avis :
Lou et Sonia 3 : le tome de trop ?
Guère d'évolution au niveau de l'intrigue dans ce roman qui ressemble beaucoup au précédent. Il y est à nouveau question de choix d'orientation et d'indépendance parfois difficiles à assumer, ce qui est pour les deux héroïnes à la fois "grisant et inquiétant". Lou se retrouve confrontée au monde impitoyable de la prépa où la concurrence se mêle à "ce mot terrible : débouchés", où la réussite se mesure en statistiques. Situation stressante, et même pas du tout épanouissante : "La voilà projetée dans la vie, sans protection, sans guide"...
De son côté Sonia apprend à faire des compromis, jonglant entre études et écriture, mais aussi entre passé et avenir puisque, à la différence de son amie, elle ne se résout pas à abandonner leur projet commun de blog : "On doit évoluer". La colocation ne se passe pas aussi bien qu'elle l'espérait, Lou ayant un caractère et un mode de vie à l'opposé du sien. Le récit est un peu plat, on s'englue dans un quotidien trop proche de la réalité pour réellement captiver, et l'on a souvent l'impression que l'auteur rapporte un vécu davantage qu'elle ne raconte une histoire. Le récit rappelle beaucoup l'ambiance de son roman adulte Les stagiaires, d'ailleurs la dessinatrice se retrouve en stage dans l'entreprise Pyxis.
A côté de ça l'écriture est toujours aussi fluide et même si le quotidien de Lou et Sonia n'a rien d'extraordinaire, il se lit vite et bien et a le mérite d'évoquer avec justesse les préoccupations des jeunes adultes. Apprenant à relativiser ("Tout le monde a droit à un temps de flottement, du moment que c'est pour mieux se trouver."), les deux filles finiront par prendre des décisions tenant compte de leurs désirs profonds, privilégiant le bonheur à la réussite : "C'est sa vie, c'est son parcours, c'est son histoire. Elle seule peut décider" la direction à donner à sa vie !
Patricia Deschamps, décembre 2017