Un soir, Hercule Poirot dîne dans un restaurant londonien. Sa table jouxte celle d'un jeune couple apparemment très épris, Jackie de Bellefort et Simon Doyle. Quelques semaines plus tard, à l'occasion d'une croisière sur le Nil, le grand détective a la surprise de retrouver Simon Doyle marié à Linnet Ridgeway. S'apercevant que Jackie s'ingénie à croiser le chemin du jeune couple, Hercule Poirot est inquiet... et il a raison: Linnet est découverte dans sa cabine, tuée d'une balle en pleine tête. Par qui ?
Mon avis :
Sur les pas d'Hercule Poirot en Egypte.
C'est à l'occasion d'une croisière sur le Nil que j'ai eu envie de relire ce roman de circonstance. Quel plaisir de suivre le célèbre détective belge à Assouan, de passer devant l'hôtel où se déroule la première partie de son voyage (oui il existe toujours), d'admirer les mêmes paysages sur le bateau, de profiter comme lui de la beauté du site d'Abu Simbel (à l'époque il n'y avait pas encore de barrage)! Cela confère une autre dimension à l'intrigue, lui donnant plus de réalité.
Tout commence avec une héroïne "riche et séduisante", une "jeune fille aux cheveux d'or et au visage rayonnant de joie et d'orgueil", une "femme à qui tout réussit"... mais qui suscite les jalousies. "Un brin tyrannique" (ou enfant gâtée, c'est selon), Linnet Ridgeway a "beaucoup d'ennemis" ("tout le monde me hait ici") et après la présentation, en Angleterre, des personnages "dans l'ordre de leur apparition", c'est sans surprise que l'on retrouve la belle héritière assassinée sur le steamer.
Dans la seconde partie, Hercule Poirot, bien qu'il soit en vacances, passe en revue les différents mobiles avec le colonel Race. Windlesham le prétendant évincé, Sir George Wood l'ancien propriétaire du manoir, Pennington l'homme d'affaires américain chargé des intérêts de la milliardaire, une mystérieuse personne "dont la famille avait été ruinée par le père de Linnet": ils sont en effet nombreux à bord à avoir un grief contre la victime. Beaucoup cachent également un secret n'ayant rien à voir avec le meurtre mais qui lance sur une fausse piste ("Ce qui rend une enquête difficile, c'est la manie qu'ont les gens de maquiller la vérité sous les prétextes les plus puérils"). Et comme souvent, le lecteur n'a pas accès à tous les indices, le détective gardant lui-même secrètes certaines observations et déductions.
Si le déroulé exact du crime nous échappe, l'issue est néanmoins beaucoup plus prévisible que dans les enquêtes les plus fameuses de l'auteure, et la toute fin un brin mélodramatique. Malgré tout je reste admirative de la modernité de l'écriture qui fait que personnages et situations restent transposables à notre époque, et que l'on prend toujours plaisir à relire, comme je le fais régulièrement, l'oeuvre d'Agatha Christie. Prochaine étape: une enquête de Miss Marple !
Patricia Deschamps, février 2020