Les Blancs veulent notre peau et nous la leur. C'est une guerre lente, une guerre d'usure, qui se déroule chaque jour dans tous les recoins de la ville.
Née en 1944 à Birmingham en Alabama, où sévissent la ségrégation raciale et les attaques du Ku Klux Klan, Angela adhère au Che-Lumumba Club en 1968 puis au Black Panther Party. La chasse aux communistes ainsi que le programme Cointelpro du FBI ne laissent pas de répit aux activistes afro-américains. Tous les groupes d'opposition sont infiltrés et surveillés. En 1970, suite à l'attaque du tribunal du comté de Marin, Angela Davis deviendra "l'ennemie public numéro un" et sera emprisonnée pour être condamnée à mort. Le "comité national uni pour la libération de Angela Davis" est alors créé. Le monde entier connaîtra son histoire et demandera sa libération.
Mon avis :
J'ai trouvé le graphisme particulièrement inventif, avec ses mises en page qui varient en fonction des épisodes. Les couleurs sont tour à tour brun chaud, ou noir et blanc bien sûr dans ce monde ségrégationniste. Parfois les vignettes sont immenses, avec des scènes qui s'étalent sur plusieurs, ou qui se lisent à l'horizontal sur deux planches. Le récit alterne avec des articles de journaux, des illustrations pleine page ou encore des superpositions. C'est un album très créatif, vraiment agréable à parcourir!
Par contre le texte est dense, avec beaucoup d'informations politiques pouvant rebuter ceux qui sont peu au fait de la situation de l'époque aux Etats-Unis. La première partie revient sur l'enfance et l'adolescence d'Angela Davis, racontée par l'une de ses camarades de classe. Elève brillante, Angela "a toujours eu une âme de justicier", participant au boycott des bus organisé par Martin Luther King et autres manifestations. Son quotidien est fait de discrimination et même d'attentats contre les Noirs (par le Ku Klux Klan).
C'est un événement aussi violent qu'inattendu qui entraîne la deuxième partie, narrée cette fois par la principale protagoniste. Etudiante à New York ("Les choses sont différentes dans le nord"), Angela fait de nombreuses rencontres et lectures qui alimentent son désir de lutte et la mènent à intégrer le BPP (Black Panther Party), groupe révolutionnaire luttant contre les violences policières. Un combat qui la mènera en prison, accusée de conspiration (nous sommes en pleine chasse aux communistes).
C'est ensuite la jeune journaliste June Seymour qui nous raconte la vie mouvementée de la militante noire qui, bien qu'enfermée entre quatre murs, continue de travailler à l'émancipation de son peuple. Cette dernière partie se conclut sur son procès et l'épilogue expédie un peu la suite de sa vie: malgré la désintégration du BPP, Angela a poursuivi son combat contre le sort des prisonniers noirs ("les prisons sont désormais un système d'esclavage institutionnalisé").
Un album qui donne une bonne idée de l'engagement d'Angela Davis dans les années 1960-70.
Patricia Deschamps, février 2021