Lettre d'une inconnue

Stefan ZWEIG (1881-1942)

source images : Wikimedias commons
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Stefan Zweig naît en 1881 à Vienne, alors capitale de l'empire austro-hongrois, dans une famille aisée d'origine juive. Il reçoit une éducation laïque dans un lycée réputé. Mais cette formation, trop rigide pour lui, l'ennuie. Il obtient son baccalauréat en 1900.

 

Zweig veut devenir écrivain. Il lit beaucoup, sort au théâtre et au concert. Il publie des articles dans l'un des principaux quotidiens de Vienne. En 1904, il obtient son doctorat de philosophie. Jusqu'en 1913, il voyage beaucoup, en Europe et dans le monde. Comme lui, ses amis défendent des idéaux d'humanisme et de pacifisme. Zweig admire notamment le fondateur de la psychanalyse, Sigmund Freud. En 1913, il rencontre Friderike Winternitz, elle-même écrivain, qui deviendra sa femme en 1919.

 

Dès 1930, il assiste avec inquiétude à la montée du fascisme et du nazisme. Avec l'arrivée d'Hitler au pouvoir en 1933, l'antisémitisme se déchaîne ; ses livres sont brûlés. En 1934, il choisit de s'exiler et s'installe à Londres, sans sa femme qui refuse de quitter l'Autriche. Il noue une liaison avec sa secrétaire Lotte Altmann et l'épouse en 1939, après son divorce.

 

En 1938, avec l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne, Zweig perd sa nationalité autrichienne. Il s'installe à Bath en Angleterre et obtient la nationalité britannique en 1940. Mais les victoires d'Hitler l'angoissent et il souffre du rejet, en Angleterre comme aux Etats-Unis, de la langue et de la culture allemandes. En 1940, il s'installe au Brésil avec Lotte. Après la victoire du Japon à Singapour, base militaire britannique, la dépression l'emporte et il organise leur suicide le 22 février 1942.

 

Zweig a pratiqué tous les genres littéraires. Ce sont ses biographies historiques et ses nouvelles qui lui ont valu le plus grand succès. Parmi les plus célèbres : Amok ou le fou de Malaisie, Lettre d'une inconnue (1922), Vingt-quatre heures de la vie d'une femme (1924), La Confusion des sentiments (1927). La dernière, Le Joueur d'échecs (1943), se réfère aux prisons et aux tortures du régime nazi.

 

Source : Lettre d'une inconnue, Hatier, 2016 (Œuvres & thèmes) p.6

Hatier, 2016, 157 p. (Oeuvres & thèmes)
Hatier, 2016, 157 p. (Oeuvres & thèmes)

 

À son retour à Vienne d'une excursion de trois jours dans la montagne, le célèbre écrivain R. reçoit une lettre d'une inconnue.

 

L'enfant de la jeune femme vient de mourir de la grippe espagnole, et celle-ci, atteinte également de la maladie, trouve sur son lit de mort le courage de raconter sa triste histoire à celui que, sans qu'il le sache, elle a aimé toute sa vie.

 

"à toi mon amour qui ne m'a jamais connue"

Mon avis :

voir le film de Max Ophüls (1948) avec Joan Fontaine et Louis Jourdan
voir le film de Max Ophüls (1948) avec Joan Fontaine et Louis Jourdan

Un amour si intense, si entier, qu'il force le respect.

Quelle histoire triste... et si belle en même temps ! Celle d'une femme qui a, depuis sa plus tendre adolescence (13 ans), voué un amour absolu à un homme qui n'en a jamais rien su... Et pourtant "je ne regrette rien, cette vie-là fut bonne malgré tout"... malgré la douleur, l'absence, la conscience, au fond, d'une fatalité pesante : "Qu'était ma vie, depuis mon adolescence, sinon l'attente, l'espérance de ton bon vouloir ?"... Une vie dans laquelle "tous les hommes avaient été avec moi bienveillants. Sauf toi. Toi seul tu m'as oubliée". Un homme qui ne mérite même pas, au fond, un si bel amour ! Une crapule de séducteur pour qui l'héroïne n'est que "une femme parmi cent"... Pourtant elle sait tout de lui (c'en est même inquiétant), à force de le guetter, de l'observer, de provoquer de "fugitives rencontres". Des années durant ! Consciente de qui il est, un homme à "double facette", insouciant et infidèle. Malgré tout, "je t'aime tel que tu es"... Ne regrettant rien de cette vie sordide à attendre "que tu m'ouvres la porte de la tienne", de cet amour donné sans rien recevoir en partage. "Ainsi t'ai-je aimé" et "je ne t'accuse pas", "je ne te reproche rien"... Tel fut le destin, atroce, de cette femme heureuse néanmoins, qui "tissa le cours de sa vie autour de cette fatalité : de toi, jamais reconnue et pour toujours inconnue"...

Patricia Deschamps, novembre 2016

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