Les quatre gars

roman de Claire RENAUD

Presque, c'est notre mot.

On est tous les quatre à un doigt de tenir quelque chose, qui nous échappe toujours.

Sarbacane, 2018, 229 p. (Exprim)
Sarbacane, 2018, 229 p. (Exprim)

"On est quatre. Tout le monde nous surnomme "la famille Dégâts" vu qu'on n'est que des gars... Il y a mon papi, mon père, mon frère Yves et moi, Louis, 9 ans.

On vit à Noirmoutier - on récolte du sel.

La mer nous nourrit, nous apaise, nous éblouit.

 

Chez nous, ça ne parle pas, ça rit peu.

Il faut dire que les femmes sont parties; depuis, papa vit comme un ours, papi parle au fantôme de mamie et Yves est accro à la drague et à la muscu.

 

ET MOI ?

Ben, moi, j'aimerais croire que cette vie, on peut faire mieux que "presque" la vivre."

 

(4e de couverture)

 

Mon avis :

"(...) ce moment si triste et si doux à écouter la chanson de Barbara" (p.112)
"(...) ce moment si triste et si doux à écouter la chanson de Barbara" (p.112)

Un roman entre souffrance et tendresse.

Louis est un petit garçon en souffrance. "Pâle et maigrichon", considéré comme "le sensible et le chialeur" dans cette famille de gars, alors que son frère aîné est "une masse de muscles" comme son père, il se sent "si différent d'eux, tellement autre, et loin et seul". D'autant plus que depuis le départ brutal et inexpliqué de sa mère, son père se comporte "comme un bourru, un taiseux, une brute" qui accomplit son travail de saunier et sa petite vie routinière sans un mot, sans un geste pour sa famille.

 

Heureusement il y a Papi, l'âme du foyer, celui qui cuisine, qui gère le quotidien, qui écoute et encourage son "Loulou", "pour se dire qu'on est une famille malgré tout". Papi et Louis se ressemblent, physiquement et de caractère. Ils n'ont pas la force de Jean et d'Yves (qui s'entraîne dur pour entrer dans l'armée) qui récoltent et transportent le sel, mais ce sont les meilleurs pour le vendre sur le marché à ces imbéciles de Parisiens ! L'histoire se déroule sur la presqu'île de Noirmoutier et baigne dans l'ambiance et les traditions du bord de mer vendéen. Celle-ci a d'ailleurs une importance incontestable : "La mer nettoie. Quand tu te baignes, tu as l'impression que tu te purifies, que tu laisses toute ta saleté du corps mais aussi de la tête, toutes tes mauvaises pensées et tes peurs dans les vagues qui repartent au loin, chargées de crasse et de soucis."

 

Avec Papi, Louis comprend que son père est avant tout "un homme qui a souffert... terriblement" : "une grosse blessure amoureuse a fermé son cœur". Autrefois "il a été un autre homme, avec un sourire et de la douceur et de la fantaisie" et "ça vaut la peine de se casser la tête pour un type comme lui. Tout le monde a besoin d'un petit coup de pouce dans la vie". D'autant plus qu'une lueur d'espoir se présente en la personne de Mlle Mariette, la maîtresse de Louis, qui ne semble pas insensible au charme brut de Jean... Dès lors, Papi, Louis, Yves et même les copains vont s'unir dans la complicité pour enflammer la braise entre ces deux-là.

Une autre figure féminine va, de son côté, bouleverser l'attitude d'Yves. Yves qui, tombant par ailleurs de son piédestal de champion lors d'une fête locale ("ça fait bizarre de perdre"), va peu à peu modifier sa vision des choses. Comme quoi il est toujours bon pour un homme d'avoir une femme dans sa vie (et vive-versa) ! Et surtout, "ce qui nous faisait peur semble avoir perdu son pouvoir sur nous"... ce qui est indispensable pour "se relever" dans la vie.

Patricia Deschamps, juin 2018

du même auteur
du même auteur


Retrouvez Takalirsa sur Facebook, Babelio, Instagram  Youtube, Twitter et Tik Tok

Making of d'une chronique