"Je m'appelle Ulysse, j'ai quinze ans et je veux mourir."
Cela fait tout juste un an que le grand-père d'Ulysse, Anton, est mort bêtement en confondant de la carotte sauvage et de la ciguë. Ulysse vivait heureux avec son grand-père. Ils avaient même une île minuscule où ils jouaient les Robinson.
Désormais, Ulysse habite avec son père - toujours en déplacements - et sa belle-mère Laetitia, une bourge écervelée qui ne peut pas le supporter et d'ailleurs l'ignore la plupart du temps. Le jour où Laetitia écrase par mégarde le chat d'Ulysse avec sa voiture, c'en est trop. Ulysse s'enferme à clé dans sa chambre. Il ne souhaite qu'une seule chose : mourir à son tour, pour rejoindre son grand-père et aussi sa mère qui est décédée quand il était petit.
Ulysse passe alors son temps sur internet, avec ses idées noires... Il finit par tomber sur un site consacré au suicide qui le captive : "Le soleil et la mort", alimenté par un certain Vladimir. On peut y tchatter 24h/24 avec d'autres adolescents aussi désespérés que soi...
Assez rapidement, Ulysse se lie d'amitié avec Kim, puis Océane, et Marco. Et puis un jour, Vlad leur propose de passer à l'action : se retrouver tous les cinq pour se suicider collectivement...
Mon avis :
Un très bon petit roman au style très actuel et au thème pertinent. Les phrases sont courtes et bien ficelées, et le texte agrémenté d'expressions percutantes comme "Pour vivre heureux vivons cachés. Pour vivre malheureux aussi d'ailleurs."
J'ai bien aimé également le passage sur "les éclopés à vie" qui ont raté leur suicide : "Vlad nous avait parlé d'un type qui s'était tiré une balle dans la tête (...) au réveil, il avait un oeil en moins, la moitié du cerveau niqué, mais il était toujours vivant. - Vous avez eu une sacrée chance, lui avait dit le chirurgien. Tu parles d'une chance !". On l'a compris : l'auteur aborde un thème délicat, mais sans morosité.
Le roman fait de nombreuses allusions à des philosophes : Socrate, mort par la ciguë, comme le grand-père d'Ulysse ; la caverne de Platon, symbole de l'ignorance et de l'étroitesse d'esprit, etc. Le titre du livre est d'ailleurs lui-même tiré d'une citation de La Rochefoucauld : "Le soleil et la mort ne se peuvent regarder en face." Autant d'occasions donc d'élargir la réflexion sur la perception de la mort.
Il est juste dommage que la scène finale soit un peu expédiée. Dans ce genre de roman court, la chute est primordiale, et là, on a l'impression que tout va trop vite. Mais cela reste une très agréable lecture !
Décembre 2012