En France, nous avons tout ce qu'il nous faut pour vivre, étudier et nous devrions le partager avec ceux qui ont tout quitté et n'ont plus rien.
Sa mère l'a décidé: il faut que Jeanne s'éloigne de Lyon pendant les deux semaines de vacances de la Toussaint. L'adolescente n'arrive pas à surmonter sa rupture douloureuse avec son premier petit ami. Direction Saorge, un village perché près de la frontière italienne où va l'accueillir sa tante Miette.
Dès le premier soir, Miette est mystérieuse: elle abandonne Jeanne après avoir reçu un coup de fil. Puis arrive un jeune Africain, Mamadou, qui semble bien connaître la maison... Miette va vite révéler ce qui occupe ses journées: Saorge est un lieu d'accueil pour les nombreux migrants qui tentent de quitter l'Italie pour entrer en France et, comme de nombreux habitants de la vallée de la Roya, elle est une aidante, véhiculant, nourrissant, accueillant des réfugiés.
(Texte : service de presse)
Mon avis :
Un roman plein de générosité, au cœur d'une nature sauvage mais apaisante.
Quand Jeanne arrive au petit village de Saorge dans les Alpes, le "cocon" où vit sa tante tout près de la frontière italienne, elle n'a que faire de ces histoires de migrants qui s'infiltrent en France par les chemins de montagne. Elle sort d'une rupture compliquée et ne pense, égoïstement, qu'à sa souffrance personnelle alors que sa tante "souffre de la souffrance du monde". Comme la plupart d'entre nous (soyons honnêtes), l'adolescente ne se sent guère concernée par autre chose que "le confort de ma vie actuelle". Elle est là pour profiter de la beauté de la nature, que l'auteure dépeint d'ailleurs avec beaucoup d'engouement.
Mais à force de voir "des vies arrachées, des familles fracassées", d'entendre "leurs récits tellement douloureux", c'est le déclic: "Je ne peux pas continuer à pleurer sur moi, à me plaindre". Jeanne commence à suivre Miette (et un certain Ronan) dans ses actions, transporter les migrants en lieu sûr, récolter des aliments pour l'épicerie solidaire, filer un coup de main au refuge de l'oliveraie. Miette, comme beaucoup d'autres au village, se consacre entièrement à son rôle d'aidant. A ses côtés, Jeanne réalise l'ampleur de la situation mais fait aussi de belles rencontres, d'un côté comme de l'autre.
Parmi les immigrés, beaucoup d'Africain(e)s qui ont appris à "positiver avec ce qui nous bouleverse plutôt que de se laisser abattre". La jeune fille est impressionnée par leur courage ("Tu ne peux pas imaginer tout ce que m'apportent ces êtres dignes qui ne font que passer") et fascinée par leurs récits de vie qui lui font découvrir leur quotidien, leurs traditions ("Tu vois comme les choses les plus simples peuvent faire du bien"). Ces moments "de partage, de joie, d'échange" avec migrants et aidants vont lui donner la force d'affronter son "histoire d'amour ratée" (que j'ai trouvée un peu excessive, ce sont beaucoup de sujets graves pour un si petit livre) et l'ouvrir aux autres: "L'important, c'est d'agir avec son cœur, son honnêteté".
Un roman qui donne envie d'agir!
Patricia Deschamps, juin 2020