Lorsqu’au lendemain d’une fête Erica se réveille le corps recouvert d’insultes écrites au marqueur, elle comprend qu’elle a été agressée pendant son sommeil. Pire, elle réalise que son petit ami Thomas a participé à cette ignominie. Pour s’en sortir, elle convoque dans son esprit une héroïne de comics qu’elle a inventée. Que ferait Erica Strange ? Se taire ou se battre : elle va devoir choisir ! Erica Walker sera-t-elle la super-héroïne qu’elle a toujours voulu être ?
(4e de couverture)
Mon avis :
Un roman choc sur une situation d'agression sexuelle et de harcèlement.
Erica Strange, c'est "cette super-héroïne que j'ai inventée, mon alter ego parée d'une cape et d'un masque" qu'Erica s'amuse à dessiner sur son blog (et qui s'intercale entre certains chapitres). Intrépide et rebelle, son avatar a "une assurance inébranlable qui fait toute la différence entre elle et moi". Erica aurait bien besoin de ce super pouvoir au lendemain de cette fête trop alcoolisée dont elle émerge péniblement dans un sale état: Zac et sa bande ont profité de son inconscience pour la déshabiller, lui taguer tout le corps au marqueur et peut-être pire...
Pour Erica, nouvelle arrivée au lycée de Bay City et qui tentait de s'intégrer, c'est l'effondrement: "J'ai tellement honte. Je suis humiliée. Je me sens sale. Je me dégoûte". La jeune fille n'ose pas en parler à son amie Caylee car elle sort avec le fameux Zac. Quant à son petit ami Thomas, il se pourrait fort qu'il ait assisté à "ce coup bas de ses copains" et même participé...
De retour au lycée, Erica tente de se protéger derrière le personnage d'Erica Strange ("Je me dis que je suis invisible, ils ne me voient pas sous ma cape et mon masque"). Mais des photos circulent, et même une vidéo (attention, description sexuelle à ne pas laisser entre n'importe quelles mains). Et la bande est là pour l'humilier encore davantage en public ("Tout le monde est au courant")...
J'avoue avoir trouvé quelques longueurs à ce récit pourtant poignant. Erica et Thomas, dont les points de vue alternent, ruminent beaucoup, ressassent au lieu d'agir. C'est humain, ce serait crédible dans la vraie vie, mais dans un roman c'est ennuyeux quand ça dure trop. Thomas est "vraiment un lâche", il ne cesse de fuir Erica, n'osant pas affronter la situation. Celle-ci se sent abandonnée, isolée, trahie, d'autant que son amie Caylee est dans le déni total par rapport à "son ignoble mec" Zac. Ce qui m'a agacée surtout, c'est que Erica refuse l'aide des autres, repoussant sa mère, sa camarade Amber ou encore sa professeure de français Mlle Adams.
Quant aux agresseurs, ils cherchent à "réfuter l'atrocité de leurs actes, à tout effacer d'une simple affirmation, comme si de rien n'était". Pour eux, tout cela n'est qu'un jeu, d'ailleurs "déjà avant, ils étaient tout le temps sur notre dos. Depuis le début, ils nous scrutent, moi, elle, nous deux". Mais là, ils ont franchi la limite de la légalité et les conséquences peuvent être très lourdes. Il y a une scène révoltante où le père de Thomas, avocat, convoque les familles concernées par les accusations pour s'entendre sur une ligne de défense afin "d'éviter de monter cette affaire en épingle". En gros, ils nient tout. Drôle de vision de la justice! Heureusement certains ont une morale.
"Que ferait Erica Strange?". La question, et la réaction, arrivent un peu tard. Mais l'héroïne finira par réaliser qu'il existe des personnes sur qui elle peut compter pour "apprendre à surmonter cet événement traumatisant". Le tout est de "regarder la vérité en face", d'accepter ses émotions et de croire que "ça va aller".
Patricia Deschamps, novembre 2023