Face à un adulte dans un bureau, Anthony raconte comment il s'est mis à martyriser son camarade de classe Gaspard.
Cette rentrée en 6e, Gaspard l'appréhendait un peu. Mais tout se serait bien passé si Anthony
n'avait pas décrété qu'il avait "une tête à claques"... Gifles et coups de pied, cartable balancé dans les toilettes des filles, affaires abîmées... Chaque jour a son lot de brimades et d'humiliations, y compris en dehors du collège puisque les deux garçons sont voisins.
Jusqu'au jour où Gaspard décide de répliquer, entraînant Anthony dans la surenchère...
Mon avis :
Un court roman à deux voix qui décortique le mécanisme du harcèlement.
On ne sait pas trop à quel adulte s'adresse Anthony dans ce bureau (même si on en a une petite idée), mais l'objectif est clair : l'amener à réfléchir à son comportement et ses motivations, en dehors de toute sanction. Si le jeune garçon revient assez volontiers sur les événements, il fait clairement preuve de mauvaise foi. Mais ce qui choque le plus, c'est que son choix s'est porté sur Gaspard pour trois fois rien : une allure, une coupe de cheveux, une tenue, un air (trop) gentil... Le pauvre Gaspard n'a rien fait de mal, n'a rien à se reprocher - autrement dit n'importe quel enfant peut se retrouver à vivre un tel drame pour peu qu'il ait la malchance de tomber sur un imbécile comme Anthony.
Le récit s'inspire d'ailleurs d'un témoignage authentique ayant ému et révolté l'auteur : on le retrouve en fin d'ouvrage sous la forme d'une lettre écrite par la mère de l'enfant. Lettre que j'ai trouvée, à elle seule, plus condensée en émotion que le roman lui-même. Certes Arthur Ténor évoque avec justesse le quotidien de souffre-douleur de Gaspard. Le récit, qui donne tour à tour la parole à chacun des enfants, est plutôt rythmé. Mais je lui trouve un style parfois désuet, dans la formulation des phrases ou le choix des mots employés : par exemple Gaspard subit les "quolibets" d'Anthony qui lui fait un "croche-patte", et étudie des équations en maths (qui ne sont plus au programme de 6e depuis bien longtemps)... Un style pas très actuel qui ne colle pas bien, je trouve, avec la teneur du propos. De plus, la fin m'a semblé idéalement optimiste. Sans compter qu'à aucun moment la mère de Gaspard n'envisage de retirer son fils du collège quelques jours, ni même d'en référer au Principal ! Les adultes semblent bien inutiles et incompétents dans cette histoire !
Un roman pertinent pour évoquer le harcèlement, mais pas pour aider à trouver une solution !
Patricia Deschamps, novembre 2015