Infiltré

Beaucoup de mystère autour de ce jeune Allemand de l'Est, "un garçon doué", "intelligent", qui sort de la Caserne des maths et des sciences. En quoi consiste exactement cet établissement? Quelles compétences y développe-t-on? Et quel est ce fameux plan "que nous projetions de mener avec Hans et Günther"? Nous sommes en pleine guerre froide (un préambule rappelle le contexte historique) et l'on se doute que la RDA formate ses recrues dès le plus jeune âge pour espionner l'ennemi... mais sans plus de détail.

Le début va très vite, en une trentaine de pages voilà déjà Dietrich à San Francisco à l'université de Stanford ("Bien plus impressionnant encore que les photos"). Tout son parcours semble fléché et c'est bluffant ("Cette période était voulue. Elle était prévue. Nécessaire. Anticipée de longue date."). Inquiétant également, car la vie de Dietrich semble toute tracée, ne laissant aucune place à la liberté individuelle.

D'ailleurs l'adolescent se laisse abuser par "cette douceur de vivre en Amérique". Il est tellement tentant de se laisser porter, loin de toute mission! "Ce qui n'avait été qu'un rôle, une simple posture, était vite devenu un intérêt sincère pour ce pays. C'était le fameux pouvoir anesthésiant de l'Amérique". Dietrich ira-t-il jusqu'au bout de sa démarche? D'autant qu'une rencontre inattendue vient bouleverser le projet...

Le roman est court et les événements s'enchaînent, peut-être même un peu trop pour que l'on réussisse à s'attacher au héros. Ce n'est qu'au moment de son départ soudain que ses sentiments deviennent enfin tangibles, mélange d’écœurement, de rage et de tristesse. Au final Dietrich devra faire un choix, le premier et sûrement le plus important de sa vie... Pour la première fois, c'est à lui de "décider comment cela devait s'achever".

Patricia Deschamps, septembre 2024