L'anonymat d'Invader est une composante essentielle de son oeuvre.
Paris, 3 heures du matin, les rues sont désertes. Une vieille R19 arrive. Orbi conduit. Invader, lui, se prépare. Leur duo est rodé et les invasions se multiplient. Plus de mille monstres pixelisés recouvrent les murs de la capitale. Orbi ralentit, Invader ajuste un masque en latex sur son visage puis bondit de la voiture.
Dès le lendemain, les "chasseurs" de Spaces partiront à la recherche des mosaïques fraîchement posées. Esther, 16 ans, fait partie de ces fans. Elle a découvert ce jeu grandeur nature avec Grégoire, qu'elle essaie maintenant d'oublier en arpentant la ville.
Ce qu'elle ignore, c'est que le corps sans vie d'une jeune femme vient d'être retrouvé au pied d'une de ces mosaïques... Quel danger plane sur les admirateurs du street artist ?
(4e de couverture)
Mon avis :
Voilà une enquête sur un thème original ! Qui ne connait pas ces petits Space Invaders qui décorent parfois les vitres des bureaux (en post-it) ou bien les murs des grandes villes ? Je me souviens m'être moi-même amusée en vacances à photographier des mosaïques dans le centre-ville de Montpellier !
Ainsi on suit l'artiste de rue dans sa fièvre créatrice qui le pousse, plusieurs nuits par semaine, à "libérer l'art des musées", mais aussi les fans du jeu qui partent à leur recherche à travers Paris afin de les flasher et gagner des points dans le classement. Le jeune Yalim, geek à ses heures, pirate même l'appli afin d'en créer une version personnalisée en vue de séduire la fille du lycée qui l'attire : il met en place, pour elle, des circuits dans la capitale, assortissant chaque "petit monstre en mosaïque" scanné d'un message personnalisé la guidant vers le suivant.
L'enquête menée par l'équipe du 36 quai des Orfèvres est plus classique, même si Lila la "simple sixième de groupe" (la dernière arrivée et donc la moins expérimentée) est attachante. C'est elle qui fera le lien entre les crimes et les Space Invaders. Indices, audition des témoins, recherches informatiques : rien de bien captivant, alors heureusement que le récit alterne avec d'autres points de vue. Le texte est également parsemé de mauvais jeux de mots dont on se serait passé (la documentaliste du lycée qui s'appelle Mlle Markhpaaj, le médecin légiste qui lance : "Ses pompes ne sont pas funèbres", l'adolescent qui prend pour pseudo Yalimonade, etc.).
Dans les derniers chapitres l'action s'accélère, l'intrigue devient prévisible mais le coupable reste une surprise. Un ensemble agréable à lire !
Patricia Deschamps, novembre 2018