Douze princesses rebelles

conte de Jessie BURTON, illustré par Angela BARRETT

d'après "Le bal des douze princesses" des frères GRIMM

Les ténèbres n'étaient que le commencement de choses nouvelles. L'obscurité était nécessaire. Elle pouvait être favorable à douze filles qui cherchaient simplement le chemin à prendre.

Gallimard jeunesse, 2019, 160 p.
Gallimard jeunesse, 2019, 160 p.

Au royaume de Kalia, douze princesses viennent de perdre leur mère. Fou de chagrin, le roi décide de les préserver à tout prix. Il leur en coûte leurs loisirs, leurs leçons et leur liberté. Mais la plus âgée de la fratrie, Frida, possède un don auquel rien de résiste : le pouvoir de son imagination. Ainsi, les princesses s'échappent toutes les nuits dans un monde merveilleux où une lionne bienveillante les invite à écouter leur détermination. Pourquoi une princesse ne pourrait-elle pas remplacer le roi ?

 

(4e de couverture)

Mon avis :

Un conte résolument féministe.

Je ne connais pas le conte originel mais j'ai trouvé celui-ci très agréable à lire, entre le papier de qualité, les illustrations élégantes et le style si vivant de l'auteur qu'on a envie de lire le texte à voix haute pour en savourer toute la richesse.

 

Les douze princesses évoluent dans un royaume sexiste où l'on "estimait que toutes les filles étaient semblables" et que tout ce que chacune pouvait espérer, "c'était se marier avec un bon parti". Or les douze sœurs, si elles semblent constituer un groupe un peu uniforme du fait de leur complicité, ont toutes une qualité (esprit d'initiative, d'observation, adresse...) ou un talent (nager, soigner, chanter...) qui la distingue des autres. Certes Frida, l'aînée, se démarque par sa capacité à tenir tête à son obtus de père: c'est elle la meneuse qui n'a pas froid aux yeux et sait argumenter.

 

Les princesses ont donc du caractère qu'elles tiennent... de leur mère. Cette dernière a été victime d'un accident de voiture et pour le roi, "chacune de ses filles portait en elle l'étincelle de son épouse décédée". C'est ce deuil difficile qui le conduit à cantonner les princesses dans leur chambre: il a peur que ce vent de liberté insufflé par sa femme ne leur nuise aussi. Quoi qu'il en soit, pour lui, "les filles ne sont pas censées faire ne serait-ce qu'un tout petit peu de ce que vous faites" et surtout il est convaincu que "aucune femme n'est assez intelligente pour occuper ma fonction". Fonction qu'il gère très mal d'ailleurs! Si ses conseillers, effacés, dans l'ombre, n'osent rien (contre)dire, ils n'en pensent pas moins: Alberto est un roi incapable, borné, autoritaire ("Il était la loi à lui tout seul") et les soucis grèvent le royaume (mauvaises récoltes, soulèvements, etc.). 

 

Les princesses, loin de se laisser décourager, vont trouver les ressources nécessaires pour "aller de l'avant". Le monde merveilleux peuplé d'animaux et de végétaux incroyables qu'elles découvrent sous le palais existe-t-il vraiment? Ou bien est-il tout droit sorti de l'imagination de Frida? Peu importe, il leur donnera l'énergie de gagner leur liberté. A l'issue de plusieurs épreuves et d'une ruse de Frida, les douze sœurs prouveront qu'elles sont "courageuses, pleines de ressources, intelligentes, gentilles. Et terriblement imaginatives". Autant de compétences les rendant aptes à régner! Mais là n'est pas l'essentiel: elles seront avant tout devenues "des femmes actives, concentrant nos énergies sur les vies que nous nous construisons".

 

Patricia Deschamps, janvier 2020

adaptations de contes célèbres
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