On a beau vouloir l'oublier, la cacher, cette histoire de radioactivité est toujours là, elle ne nous quitte jamais.
Le 11 mars 2011, un terrible tsunami a frappé la ville de Fukushima, engendrant des dommages au niveau de la centrale nucléaire. Depuis, Fumi n'ose plus sortir de chez elle à cause des radiations dont personne ne connaît réellement la portée ni les conséquences sur la santé...
Mais Fumi est en dernière année de lycée et elle ne veut pas manquer ses examens. Alors, à la mi-avril, elle décide de retourner en cours. Ses amies Moé, Ayaka et Mayu sont heureuses de la revoir et lui proposent de relancer leur groupe de musique, "Daisy".
"On ne sait pas ce que demain nous réserve, profitons-en pour faire ce qui nous plaît, sans peur, sans limite !"
Mais aucune d'entre elles n'arrive à oublier la menace invisible qui pèse dans l'air...
Mon avis :
Un manga émotionnellement intense, qui navigue entre angoisse et espoir.
Basée sur d'authentiques témoignages, cette histoire retransmet parfaitement le mélange de peur et de colère qui anime les habitants de Fukushima. Fuir ou rester ? Irradiés ou hors de danger ? Rester enfermés ou continuer comme si rien ne s'était passé ? "Plus on nous criait haut et fort que "ce n'est rien, il n'y a aucun danger", plus on s'inquiétait de savoir si on ne nous cachait pas quelque chose"...
Car les informations officielles se contredisent : jusqu'à combien de kilomètres rayonne véritablement la radioactivité ? Que faire de la terre irradiée, des récoltes? Sans compter les décombres à dégager, le tourisme qui s'effondre... Pour les régions voisines, les habitants de Fukushima sont de véritables pestiférés !
Si Fumi et ses amies se sentent souvent impuissantes face à cet ennemi invisible et inodore, elles refusent de céder au désespoir. Echange de cadeaux symboliques, de promesses, chacune lutte comme elle peut. Mais le combat est dur et surtout inégal...
Un dossier en fin de livre revient sur la catastrophe et "l'enfer interminable" qui s'éternise depuis dans la ville...
Avril 2016
Quelles que soient les difficultés, nous continuerons à faire face, la tête haute, guidés par cette lueur d'espoir que nous portons dans nos cœurs.
Octobre 2011.
Fumi ne sait toujours pas si elle va partir à l'université de Tokyo ou rester à Fukushima, comme son amie Mayu qui a décidé de reprendre l'exploitation familiale de riziculture. Moé, quant à elle, a définitivement quitté ses amies.
Mais un petit nouveau va pouvoir reprendre le rôle de batteur dans le groupe "Daisy" : il s'agit d'un lycéen du programme "satellite", Inoué, qui vit avec sa grand-mère dans le camp de réfugiés tout proche.
L'occasion leur est donnée de participer à une action de bénévolat en jouant devant les sinistrés.
Mon avis :
Beaucoup d'émotions encore, dans ce deuxième volume. A commencer par la grand-mère du jeune Inoué, qui souffre d'être ainsi déracinée : "Je veux rentrer chez moi! Dormir dans mon futon, labourer mes champs... Je ne veux pas mourir ici !". Il y a aussi les enfants dont s'occupe Aya, séparés de leur famille, obligés de rester enfermés à cause des radiations : "Certains pensent même qu'ils n'atteindront jamais l'âge adulte"... Toutes ces familles détruites à cause d'une catastrophe qui, certes, n'a pas fait de morts, mais a des conséquences désastreuses sur des milliers de Japonais : "Ces enfants qui ne peuvent plus jouer dehors, ces villages qu'on doit abandonner, ces études auxquelles on doit renoncer... Dans cette ville qui nous a vues naître et grandir, tout nous est interdit, désormais". Et toujours cette désinformation du gouvernement sur les dangers réels de la radiation : "Si les hommes politiques prenaient leurs responsabilités, les choses pourraient vraiment changer"...
Difficile de rester optimiste dans ces conditions... Et pourtant, ces lycéens courageux assument comme ils peuvent la situation. "Même quand les temps sont durs, il y a toujours la lumière qui nous attend, au bout du tunnel", lance Inoué l'enthousiaste. Fumi, de son côté, s'interroge : "C'est quoi, avoir des racines ?", se découvre un attachement pour cette ville qu'elle cherchait autrefois à fuir par les études. Ses actions de bénévolat lui font comprendre qu'il existe une sorte de solidarité dans la douleur. Souvent démunie, elle comprend qu'à travers la musique, elle peut apporter un peu de réconfort aux autres, ses chansons ayant la faculté d'"unir les cœurs". Et c'est avec plaisir qu'on la voit enfin trouver sa voie... une voie inattendue, mais parfaitement cohérente !
Au bout du compte cette série rend concret un drame que nous, Occidentaux, ne percevons que de l'extérieur. Ce récit poignant, voire oppressant, nous fait réaliser toute l'ampleur des dégâts humains, et aussi que le problème est loin d'être réglé...
Avril 2016